Israël : Quels gains stratégiques ? – Jules Seyes

Petit rappel de la réalité des facteurs. Nous nous complaisons dans une vision du monde constituée d’images chocs, mais celle-ci influence peu les réalités sous-jacentes des puissances. Il est une fois de plus temps de le rappeler. En vue de comprendre l‘influence de l’opération du Hamas en Israël, reprenons les éléments disponibles.
En l’état de nos informations, de nombreux commandos du Hamas ont pénétré en Israël pour détruire des installations militaires et prendre des otages.

Nous pouvons admirer l’audacieuse conception opérationnelle du Hamas,lancer ses effectifs dans une opération surprise. Pourtant avons-nous compté les limites ? Je suis assez raciste personnellement et parmi mes préjugés compte mon mépris pour l’infanterie légère. On me le pardonnera ou pas (Oui, ce racisme est légal), mais rares sont les occasions depuis les unités de chasseurs de Napoléon ou des formations de voltigeurs, qui ont obtenue des résultats stratégiques. Cela ne doit pas être compris comme un mépris des hommes. Ce sont souvent des unités d’élites qui au prix d’un effort particulier des soldats obtiennent des résultats remarquables au vu de leurs moyens.

Le Hamas a ainsi réussi à obtenir des résultats hors normes par rapport aux moyens engagés. S’il s’agissait de sport on pourrait féliciter l’exploit, mais il s’agit de guerre. Dans ce domaine, les surprises sont certes intéressantes, mais il convient de supprimer les affects. Obtenir des effets hors de proportions n’est rien. À la fin seuls comptent terrains, corps de bataille et capacité à mener la guerre ?


On se rappellera la phrase du Sultan après la bataille de Lépante :
« Vous venez pour voir comment nous supportons notre malchance. Mais vous devriez connaître la différence entre notre perte et la vôtre. En nous emparant de Chypre, nous vous avons coupé un bras ; en détruisant notre flotte à Lépante, vous nous avez rasé la barbe. Un bras coupé ne peut pas repousser une nouvelle fois, mais une barbe rasée repousse avec plus de force à nouveau. »


Alors commençons par le militaire. Qu’a obtenu le Hamas ? La réponse est : rien. L’humiliation ne change pas le rapport de force réel. Le Hamas n’a pas pris un Km², pas détruit le corps de bataille israélien, quand aux usines, aux universités d’Israël, la perte d’un millier de colons n’a pas d’impact immédiat.

Bilan, il convient de l’écrire en gros : 0 à aujourd’hui.

Aujourd’hui comme hier la situation est la même sur le terrain
Faut-il dire qu’il ne s’est rien passé ? Non, il reste les civils, les images sur les télévisions, mais il convient de savoir limiter les champs d’applications. Le Hamas a remporté une victoire informationnelle. Nos médias réagissent avec hystérie. D’où ce rappel à la réalité militaire. On peut refuser l’hystérie, il est déconseillé de nier la physique (Nous avons suffisamment commis cette erreur avec l’Ukraine).

Si cette opération conduit Israël à mener une offensive à Gaza et à subir de lourdes pertes, alors, par pression psychologique une importante victoire militaire aura été obtenue. De même si l’attractivité du territoire israélien souffre alors, là encore le sacrifice du Hamas aura eu un sens. Sinon, si Israël sait limiter sa riposte sur des champs de bataille où il n’est pas menacé, alors, cette opération aura coûté cher au Hamas, sans gain véritable. Comme vous le voyez. Il est trop tôt pour évaluer cette opération, son véritable impact se joue dans la psychologie des dirigeants et les suites qu’ils décideront d’y donner.

En attendant, le pouvoir israélien parle de 11 septembre. Admettons, mais alors qu’ils se rappellent que 20 ans plus tard, les Américains quittaient l’Afghanistan dans une déroute historique. Le blanc sein ne doit en aucun cas être transformé en une autorisation d’agir n’importe comment et dans l’énervement d’un moment de stress, il est facile de commettre l’erreur de trop en faire.

Faut-il souhaiter une déroute à Israël ? Clairement non, si cet état était vaincu, la haine est telle que les habitants juifs auraient le choix entre la valise et le cercueil. Sur dix millions d’habitants ? Ce serait un drame.
De plus, la France porte une responsabilité particulière dans le sionisme. Souvenons-nous que Théodore Herzl a assisté à la dégradation de Dreyfus. Le sionisme est l’enfant bâtard d’un de nos errements.
Alors que faire ? Il existe la solution de cours terme, appeler à la vengeance, venger chaque mort avec d’autres morts. Elle est possible et l’histoire récente a montré que le personnel politique des deux camps s’y complaisait.
L’autre solution est de se rappeler que l’on est aussi grand à force de clémence. Proposer enfin la paix.


Israël et l’Amérique pourraient proposer une série de plans
Soit, le retrait d’un grand nombre de colonies, les habitants seraient indemnisés pour refaire leur vie ailleurs.
Soit, proposer à l’Égypte beaucoup d’argent pour installer une nouvelle nation palestinienne dans le désert du Sinaï. Cela suppose des centrales nucléaires, des centres de dessalement, la construction de toutes les infrastructures nécessaires pour convaincre les Palestiniens qu’une vie meilleure les attendraient là-bas. L’Egypte compenserait car l’argent lui permettrait de créer des canaux pour faire rentrer l’eau des mers dans des dépressions dans le désert. L’évaporation créerait de nouvelles zones cultivables nécessaire pour aider ce pays à retrouver son indépendance alimentaire.


Voila des idées, si la diplomatie française désire retrouver une virginité après ses errements Libyens et Ukrainiens, l’heure de se mettre au travail sonne. Bien sûr les Américains n’apprécieraient pas (En tout cas les Néo cons, il reste peut-être des individus sensés à Washington), mais une politique discrète de bons offices pourrait permettre d’orienter.


Sinon, rassurez-vous, il y aura d’autres opérations, d’autres morts… Le voulons-nous ?


Jules Seyes

Jules Seyes (nom de plume), publie des livres et des articles dans plusieurs médias (Média 4-4-2, Donbass Insider, Observatoire de la Propagande). Contrôleur de gestion essentiellement dans les usines automobiles, cette expérience imprègne son analyse des questions productives et économiques, avec un soin particulier apporté à la technique et la rigueur des chiffres. Sa biographie

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