Terminer la guerre – Jules Seyes

Mauvaise nouvelles d’Avdivka. Comme je l’ai déjà déclaré, l’affaire de Gaza, doit être vu juste comme une diversion. Moins de dix mille morts à ce jour, certes il s’agit d’un élément dommageable et le bilan va s’alourdir, mais je rappelle à nos médias pleins de sensibilité que la guerre du Yémen a causé 300 000 cadavres sans provoquer les masses d’articles baveux de nos journalistes. (Je vous épargne les massacres au Congo ? Ce sont juste des noirs et il semblerait que ce soit des pouvoirs financiers anglo-saxons à la manœuvre, donc pudiquement on évitera d’en parler.)
D’ici quelques semaines, mois, Israël aura largué ses bombes, usé ses obus et sauf à réussir à contraindre les Palestiniens à un exode inversé vers l’Égypte, la situation sera la même qu’au début septembre.
Reste à attaquer l’Iran, oui, enfin, on nous en parle depuis dix ans et à force de crier au loup je finis par douter du dogme. Bien sûr, certains à Washington et parmi nos dirigeants sont assez atteints dans leurs psychés pour déclencher ce conflit, mais cela relève de la nécessité de dissimuler les difficultés financières de l’occident et bien sûr d’une prise en charge non effectuée à temps des cas psychiatrique dans ces régions.

Et tel est le point clé de cette situation, gérer l’hôpital psychiatrique occidental. Je vous l’accorde, E.Macron s’est tourné en ridicule, nous en avons la triste habitude, mais pour autant aucun psy n’a été nommé pour le prendre en charge. Il fut un temps, après un tel fiasco, le président eut été destitué. Nous avons hélas l’habitude et la catastrophe demeurera en place.

Donc l’hystérie aurait pu être utile pour dissimuler la défaite de l’OTAN en Ukraine aux médias occidentaux. Enfin, la provoquer dans un moment où celle-ci n’existe pas dans l’esprit de nos journalistes.
Il aurait fallu pour cela que les Russes profitent de l’occasion pour terminer le conflit au plan militaire. Hors les opérations d’Avdivka montrent que cela ne sera pas le cas.
Alors, pourquoi les Russes auraient-ils intérêt à terminer le conflit ? Et pour quelles raisons, le non succès d’Avdivka est il un problème et pour qui ? Voilà nos questions du jour.
Au plan politique, les Russes ont-ils intérêt à terminer le conflit ?
Les temps sont loin où la Russie pouvait se contenter d’une promesse de neutralité de l’Ukraine et de l’autonomie/Indépendance du Donbass/Lougansk. La décision des dirigeants occidentaux d’inciter leurs homologues ukrainiens à poursuivre les combats a contraint la Russie à entrer en conflit presque frontal avec le bloc occidental. Le monde a changé en Avril 2022 grâce à nos brillants gouvernants.


Sur ce plan, la guerre a été un grand schelem russe. Elle a crédibilisé de nouveau les armes russes, ruiné la réputation de celles de l’OTAN et ainsi inversé les dommages de la séquence 1989/1991. Elle a aussi montré l’épuisement du système ONU/OTAN désormais vu comme un moyen d’imposer les seuls intérêts occidentaux et perçu comme injuste.
Les coups d’État en Afrique ont montré la fragilité des pouvoirs pro occidentaux mis en place grâce à une pseudo-démocratie. On notera d’ailleurs que les populations ne se sont pas précipitées pour défendre les dirigeants pour lesquels ils avaient voté. On nous parle de démocratie comme le meilleur des régimes, mais il ne semble plus éveiller l’enthousiasme.
Le sommet des BRICS avec la masse de candidats à l’intégration a démontré que le monde se sent désormais libre de s’émanciper de la domination de Washington. Les pays tentaient déjà d’échapper aux griffes du FMI, maintenant avec la Chine comme préteur, la gamme des BRICS permet de fournir crédit et assistance militaire. Cette offre combinée constitue un succès pour le duo Russie/Chine1.


Sur le plan diplomatique, nous constatons que la guerre est terminée. Les Ukrainiens peuvent se défendre, mais en aucun cas réussir un assaut. L’initiative est désormais définitivement cotée russe, même si bien sûr les banderistes sauront envoyer de pauvres bougres à l’abattoir et nos journalistes présenter cela comme des triomphes offensifs.
Clou ultime dans le cercueil de la réputation militaire occidentale, la décision du président Poutine de déployer des avions équipés de Kinjal achève de prouver au reste du monde la capacité russe de pouvoir mener une dissuasion conventionnelle contre les forces aéronavales US.
Reste un seul objectif envisageable : Briser le bloc occidental et sûrement l’Europe. La Slovaquie montre qu’un tel but peut-être atteint.
En France après les gilets jaunes, le président avait déclaré : « Ils me tueront peut-être d’une balle. » Certes, depuis, avec sa gestion douce de la COVID et le conflit, ses soutiens se sont peut-être polarisés, mais qui peut douter qu’en face, une part considérable de la population est encore plus radicalisée ?
Tous les calculs se sont révélés faux : à propos du Covid, le pass sanitaire fut imposé sur une base scientifique fragile, ce qui en fait un acte de tyrannie. En Ukraine, la défaite militaire montre que nous avons sacrifié cette population au nom d’une analyse fausse de la réalité. Non Bruno, ne saute pas, la Russie n’est pas à genoux comme la dame dans ton livre, tu vas devoir te restreindre sur les mots qu’interdit la décence. Les autres dirigeants des pays membres de l’OTAN affrontent peu ou prou les mêmes problèmes avec peut-être légèrement davantage de dignité.


Lentement, il devient difficile de défendre notre bande et si les Russes se mettent véritablement en devoir de structurer des réseaux comme les Américains l’ont fait dans les républiques ex soviétiques pour organiser leurs révolutions de couleurs, ils trouveraient chez nous un terreau fertile.
L’Europe est l’ultime champ de bataille de la guerre d’Ukraine. Pas une zone de combat, mais au plan politique. Alors certes, il paraît que les Russes attaquent les pays, la preuve, les punaises de lit, les problèmes d’informatique des CDI en France ou l’idée ridicule que les américains puissent préférer Donald Trump à Hilary Clinton. Impossible bien sûr, un type qui organise des meetings géants dans l’Amérique profonde et leur parle des opioïdes est forcément plus antipathique qu’une dame qui traite ces populations de déplorables.
Mais, en dehors de ces preuves éclatantes, où se trouve l’intervention Russe ? Leur vision du monde passe et met le récit de nos médias en cause ? Effort faible, limité, tant le narratif de nos journalistes s’éloigne de la réalité et s’auto-disqualifie. Il reste à former des cadres, un véritable parti en position de constituer une alternative aux pouvoirs pro américains. Tout l’appareil d’une prise de pouvoir capable d’encadrer le vaste groupe social des mécontents. Il faut structurer une idéologie, construire des organisations, bref il y a du travail.
L’avez-vous vu ? Franchement non, on pourrait presque croire que les Russes nous haïssent assez pour nous laisser encore supporter les prochaines bêtises de nos dirigeants. D’un point de vue financier, ils ont raison. La bêtise à venir de nos dirigeants est certaine, tout comme la réémergence des centaines de milliers de milliards de dollars de capital fictifs dans notre système financier. L’effondrement occidental est inévitable2, il vaut mieux pour eux investir dans le reste du monde. Enfin, ne soyons pas méchants, nous aurons ainsi le temps d’assister au procès de monsieur Bankmann. (Non vilains, vous n’aurez pas le délai pour découvrir la liste des clients d’Epstein, les choses sérieuses se produiront après la chute de l’occident).
Tout cela pour constater que non, les Russes n’ont pas attaqué nos institutions, il leur suffit de poursuivre l’affrontement économique voulu par nos dirigeants. (Non Bruno, c’est toi qui vas te mettre à genoux pas la Russe, tu le saurais si tu avais travaillé tes maths dans ton enfance.).
Donc, sur le plan diplomatique, les Russes ont terminé la récolte et la contribution d’une poursuite du conflit est limitée. Seulement, le peuvent-ils ?

L’affaire de Gaza constituait donc un moyen de terminer les opérations en douceur loin de l’œil des caméras occidentales. La victoire russe aurait pu se produire sans exciter nos dirigeants et éviter de leur infliger une perte de prestige supplémentaire.
Hélas, tout conflit à son rythme hors de portée des responsables. Avdivka a montré la réalité du blocage tactique. Même pour les russes, les gains requièrent de petites opérations soigneusement programmées et les percées ne sont pas à l’ordre du jour. Malgré un engagement blindé conséquent, les troupes motorisées ont échoué à créer un chaudron. Nous allons assister à des combats, certes mieux menés qu’à Robotnye3. Mais le pouvoir d’interdiction des armes antichars demeure et empêche toute opération d’envergure. Il reste juste, des combinaisons d’opérations d’infanterie et d’artillerie.
Il n’y aura donc pas de résolution rapide du conflit. Juste une série d’opérations lentes qui broieront ce qui restera du potentiel humain de l’Ukraine. : Les jeunes en cours d’études, les femmes seront jetées dans les tranchées, ce qui aggravera le coût humain de ce conflit et donc la haine du reste du monde envers nous.
L’heure sonne de savoir organiser la capitulation rapide de l’Ukraine, l’accord ne s’obtiendra désormais qu’au prix de donner aux Russes tout ce qu’ils demanderont. Coût terrible certes, mais il fallait y réfléchir en 2022 et j’espère que les responsables seront jugés devant une CPI rénovée comme cadre d’un ordre international remodelé. Messieurs Boris Johnson et Monsieur Macron sont coupables de crime contre la paix. Qu’ils trouvent une solution pour une paix à bas bruit durant cette ultime fenêtre de tir ou qu’ils paient leur imprévoyance !

  1. Rassurez-vous, les pays du sud global s’assureront de garder deux offreurs à mettre en compétition, si nous sommes encore capables de prêter d’ici une décennie. ↩︎
  2. Avec le personnel politique actuel. Sinon le champs des possibles est vaste, mais le contrôle politique en place rend toute alternative impossible avant la fin de la tragédie. ↩︎
  3. Difficile de faire pire, mais nous avons eu des mois de LCI pour nous familiariser avec le niveau d’incompétence de ce que l’on appelle la pensée militaire occidentale. Ce mélange de racisme, de mépris de l’adversaire et de refus de prendre en compte les mauvaises nouvelles est répugnant. ↩︎

Jules Seyes

Jules Seyes (nom de plume), publie des livres et des articles dans plusieurs médias (Média 4-4-2, Donbass Insider, Observatoire de la Propagande). Contrôleur de gestion essentiellement dans les usines automobiles, cette expérience imprègne son analyse des questions productives et économiques, avec un soin particulier apporté à la technique et la rigueur des chiffres. Sa biographie

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