Mélenchon et les musulmans : qui instrumentalise qui ?

Jean-Luc Mélenchon est sous haute tension, l’insoumis en chef étant soumis à des vents contraires : entre son « républicanisme » d’antan et son « progressisme » sociétal d’aujourd’hui. D’où ce tweet : « Chers compatriotes musulmans ou originaires comme moi du Maghreb, préparez-vous. Pour faire diversion le gouvernement annonce par la voix de Bruno Le Maire une nouvelle campagne pour vous montrer du doigt. Sang froid. »


Il s’agit là de répondre aux propos du ministre de l’Économie et des Finances, évoquant ces fraudes aux prestations sociales qui seraient souvent dues à nos compatriotes d’origine nord-africaine. Il aurait même pu y ajouter ceux d’Afrique sub-saharienne. Cela dit, on invite nos lecteurs à lire ces deux livres du magistrat Charles Prats, consacrés à ces détournements d’argent public en bandes organisées : Cartel des fraudes, tomes 1 et 2 (Ring éditeur).

Les réseaux sociaux étant ce qu’ils sont, voilà le Líder minimo mis une nouvelle fois sous haute tension, à en croire ces deux autres tweets immédiatement postés en réponse :

« Vous êtes sérieux à insinuer que les fraudeurs sociaux sont forcément musulmans et/ou maghrébins ? C’est quoi ce racisme décomplexé ? Même Zemmour n’aurait pas osé. »

« Vous sortez le mot « musulman » pour tenter de faire du racolage identitaire. Vous ne valez pas mieux que l’extrême droite. »

Bref, Jean-Luc Mélenchon tente à nouveau d’instrumentaliser à son profit ces Français d’origine maghrébine et de confession musulmane. Mais, qui instrumentalise qui, dans cette affaire ? Il y a presque un an, le 22 avril 2022 dans Marianne, l’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler affirmait déjà : « Il s’agit là du résultat d’une longue campagne dont la stratégie a été déterminée dès 2017 lorsque le candidat à la présidentielle s’est rêvé en finaliste du second tour allant même jusqu’à contester les sondages de sortie des urnes. Il manquait au candidat de la France Insoumise les musulmans pour combler la désaffection des catégories populaires pour les partis de gauche désormais attirés vers celui de Marine Le Pen. »

En d’autres, termes, Jean-Luc Mélenchon avait fait siennes les analyses de la fondation Terra Nova, proche du Parti socialiste, publiées le 10 mai 2011 et conseillant à ce dernier de passer les classes populaires en pertes et profits, estimant plus rentable de se recentrer vers d’autres cœurs de cibles électoraux à long termes plus rentables : les minorités sexuelles, ethniques et religieuses.

Mais il y a cette contradiction insurmontable, souvent évoquées en ces colonnes, que souligne aussi Florence Bergeaud-Blackler : « Si les Français s’identifiant à la communauté musulmane ont massivement voté pour Mélenchon, les motifs ne sont pas totalement clairs. En effet, LFI défend des propositions pro-LGBT (…) assez peu compatibles avec les positions conservatrices des monothéistes et moins encore avec celle des musulmans fondamentalistes pour lesquels l’homosexualité est un péché passible de la peine capitale. Les relations entre Mélenchon et les indigénistes sont ambiguës. »

On comprend mieux pourquoi Marine Le Pen affirme ne pas vouloir se laisser « entraîner dans une guerre de religion », et refuse de fait d’instrumentaliser ou de stigmatiser telle ou telle catégorie de Français.

Pour le moment, la stratégie de Jean-Luc Mélenchon paraît gagnante, tels qu’en témoignent les 69 % de suffrages musulmans s’étant porté sur lui au premier tour de l’élection présidentielle de 2022. Au second tour de ce même scrutin, 15 % de ces derniers se reportaient néanmoins sur Marine Le Pen. C’est peu, mais il y a près de quarante ans, lors des élections européennes de 1984, le Front national commençait son ascension avec encore moins : 10,95 % de l’ensemble des Français.

D’ailleurs, il y a fort à parier que la présidente du RN soit finalement plus respectée par les communautés maghrébines et musulmanes, par un franc-parler, à la fois exempt de flatteries et d’insultes, qu’un Jean-Luc Mélenchon aussi roublard que maladroit. Même né de l’autre côté de la Méditerranée, le patron de la France insoumise a décidément encore beaucoup à apprendre sur les subtilités des âmes orientales.

BOULEVARD VOLTAIRE est un média indépendant orienté à droite très critique sur la religion et la culture en France.

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Publié le 19 Avril 2023 par Nicolas Gauthier : https://www.bvoltaire.fr/melenchon-et-les-musulmans-qui-instrumentalise-qui/

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